Son engagement important pour la planète et sa passion pour les montagnes et glaciers ont porté Bernard Garo vers de nouveaux horizons artistiques. Après un début d’année particulier, l’artiste travaille sur des projets très impliquants, qui devraient être dévoilés en fin d’année. Il déploie actuellement trois nouveaux projets forts autour des glaciers.
Un court métrage sur les mouvements des glaciers
Voici son témoignage sur le tournage d’un court métrage d’art et essais, à propos des mouvements des glaciers qui dépérissent :
« Les glaciers engloutissent et broient tout, ils bougent et vivent comme des humains – une approche originale autant en surface avec des drones que dans les entrailles du glaciers avec une caméra portée, mêlant la réalité avec mes œuvres. L’objectif est de révéler artistiquement et émotionnellement la souffrance de ces géants glacés, confirmée aujourd’hui avec l’apparition du Coronavirus, après bien d’autres fléaux qui ont jalonné notre triste histoire humaine. Thématiques que je développe depuis longtemps pour tenter d’amener les regards au-delà des choses et du présent, ce d’autant plus dans nos sociétés contemporaines avec les rythmes de travail infernaux. On ne sait plus voir.
C’est justement mon rôle d’artiste que de révéler autrement ces détails oubliés, comme les micros-mouvements, les micros-structures, la matière, la sensualité, l’espace et le temps. Par ailleurs comment mesurer le temps ? »
Une série de photographies argentiques
Bernard Garo aborde un nouveau projet photographique avec un appareil argentique de moyen format Hasselblad (appareil de photo de réputation mondiale dont la société a été créée en 1841, et dont un appareil identique à celui utilisé pour cette démarche est allé sur la lune en 1969).
« La qualité de cet appareil de légende confère à l’image un excellent piqué et une douceur reconnue grâce aux objectifs Zeiss, c’est pourquoi je l’ai choisi pour développer cette démarche en noir et blanc. Le format carré m’a semblé de ce fait approprié à la recherche des mouvements et des tensions des glaciers.
La démarche tend également à rechercher un résultat avec du contraste et des noirs profonds. Je propose donc d’effectuer des virages au charbon afin d’obtenir un résultat final presque matiériste, une imagerie qui s’éloignera de la simple photographie classique, offrant une dramaturgie particulière et unique à ces images artistique. Cette démarche est doublée d’un sens profond, car le charbon est considéré comme la principale cause de pollution en C02 de notre planète. Par là-même je souhaite dénoncer cette pollution.
L’emploi d’un ancien appareil reconnu pour son empreinte identitaire n’est pas innocente, car allié à un procédé manuel et traditionnel à tirages uniques, cela nous lie à un autre temps, celui de nos parents ou grands-parents qui ont vécu le glacier dans une autre ampleur que nous, que nous ne connaîtrons jamais plus. La courte période glaciaire qui a débuté au moyen âge, s’est interrompue vers 1860, presque en même temps que la réalisation de la première photographie couleur. C’est comme si l’appareil et son procédé devenaient le témoin temporel de cette évolution.
Une stèle de papier
« Une stèle en papier dessinée au graphite – métaphore de la fragilité – figure sur certaines photos numériques, car je l’emporte partout dans le monde depuis deux ans pour représenter notre vulnérabilité et le temps qui passe. Je la photographierai jusqu’à sa totale destruction.
Les glaciers sont de plus en plus réduits, asséchés. Ils rendent parfois les armes avec le temps, comme tout humain face au déchaînement des éléments amplifiés par l’impact de l’activité humaine sur son environnement.
La photographie de haute montagne sur le terrain reste quelque chose de peu courant et difficile, je remercie sincèrement Petzl pour l’excellent matériel mis à disposition qui nous a été fort utile, ainsi que les guides et mon équipe technique qui m’ont si bien sécurisé dans cette démarche, qui se poursuivra jusqu’en 2021. »